Nous appelons tous de nos vœux une chimie et des méthodes de production industrielle respectueuses de l’environnement et d’une médecine personnalisée.
Parmi les approches susceptibles de répondre pour partie à ces vœux, la biologie de synthèse occupe une place de choix. Elle offre dans plusieurs secteurs de solutions innovantes :
L’industrie de l’énergie, de matériaux, de dispositifs médicaux, de pharmacopée dans un esprit de soins personnalisés, sans oublier l’alimentation, les soins cosmétiques…
Qu’appelle-t-on « biologie de synthèse »
L’ambition de ce domaine est de concevoir d’une manière rationnelle, et construire des systèmes nouveaux standardisés de production des molécules nouvelles inspirés par la biologie.
Construire un système biologique nouveau ça veut dire que nous avons compris les phénomènes sous-jacents, et en ce sens la « biologie de synthèse » permet de faire progresser les connaissances scientifiques sur le monde du vivant.
Cependant l’aspect ingénierie y est dominant et il s’ensuit que les applications industrielles ne sont pas très loin.
Comment sommes nous arrivés à ce point? Un lien temporel s’impose :
Hippocrate vers 380 avant JC remarqua que certains individus avaient tendance à boire en permanence et uriner en conséquence ; il qualifia ceci de syndrome de polydipsie et polyurie et lui attribue le nom de la pathologie du « passant ». Avec ses assistants il distingua, après avoir goûté les urines, un goût sucré et suggère le nom de la pathologie du « passant sucré » c’est-à-dire du « diabète sucré », car dans la langue Grecque, diabète signifie passant.
Quelques 2200 ans après…, en 1869, l’Allemand Langerhans, suggère que le pancréas n’a pas que des fonctions exocrines mais aussi endocrines en particulier grâce à des structures cellulaires disposées en amas qu’on appellera les « îlots de Langerhans »
En 1889, Oskar Minkowski et son équipe constatent que les chiens dont le pancréas a été enlevé ont tendance de boire et uriner souvent ; le constat analytique fut : les urines attirent les mouches…
En 1921, les équipes de Frederic Grant et Richard Macload ont mis en évidence l’inversion de la glycémie chez les animaux privés de leur pancréas après traitement par un extrait purifié du même tissu.
Après purification poussée de l’extrait du pancréas, en 1922, cet extrait a été injecté à un patient de 14 ans souffrant de glycémie dont la vie a pu être sauvée.
Dés 1930, désormais l’insuline (du latin « insula = île, produit des îlots de Langherans) deviendra le traitement de choix pour les diabétiques en utilisant des extraits du pancréas du porc et du bœuf.
Et il a fallu encore environ 50 ans avant que des travaux conséquents soient entrepris sur la production de l’Insuline Humaine à partir de la levure de Saccharomyces cerevisiae ; objectif atteint en 1986.
Depuis les progrès réalisés en trente ans sont substantiels et suscitent fascination mais aussi inquiétude. C’est déjà une réalité car des dizaines de nouveaux produits industriels bénéficiant de cette technologie sont commercialisés ou sont proches de l’être.
Ceci est pour beaucoup dû à une pratique sans faille de transdisciplinarité accompagnée tout au long de ces années d’une révolution technologique indiscutable ; il s’agit là d’un domaine qui a mêlé la chimie à des disciplines aussi diverses que les mathématiques, la statistique, la bio-informatique, la physique, la médecine et ses applications… l’ingénierie…
Le colloque organisé par la Fondation de la Maison de la Chimie le 14 février dernier a su, grâce à des intervenants de haut niveau, internationalement reconnus, en apporter la preuve devant de plus de 1300 participants.
Tribune libre du Professeur Constantin Agouridas, Directeur des programmes de la Fondation de la Maison de la Chimie
(Voir résumé et exposés prochainement sur le site de Mediachimie, Fondation de la Maison de la Chimie)