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« La France, le plus beau labo à traitement de complexité »
Viva Tech 2019, événement co-organisé par Publicis et les Echos a largement atteint ses ambitions. La fréquentation est en augmentation de 24 % par rapport à l’année dernière avec 124.000 visiteurs durant les 3 jours, du 16 au 18 mai ; 125 nationalités, plus de 450 speakers et plus de 13.000 startups.
Le président Macron y a participé à un échange avec quelques créateurs de start-up européennes). “Il y a quatre ans, on était les meilleurs d’Europe continentale en termes de création de start up, on avait un problème de scale-up. Aujourd’hui, il y a plus de levées de fonds : 1 Mds € levés en un an il y a quatre ans, vers 5 Mds € cette année, moins de 3,5 Mds € l’an dernier. Lever 100 millions €, de plus en plus de start-up le font aujourd’hui alors que c’était très rare. Ces 18 derniers mois, on a créé plus de licornes que les années précédentes, il y a une accélération du système et il est dans sa phase de croissance. Le système garde sa créativité, son enthousiasme, sa dynamique. On lève plus rapidement, on attire plus de talents et on acquiert plus rapidement la taille critique. Plutôt que d’être sur la défensive, nous voulons être les meilleurs du monde” a-t-il notamment déclaré.
Jack Ma, le patron d’Alibaba Group, interviewé par Maurice Levy, a fait un tabac dans le grand auditorium Stage One devant près de 2.000 personnes. Quels sont vos conseils à de jeunes entrepreneurs ? « Si vous êtes un entrepreneur, vous ne devriez jamais penser à avoir du succès dans un mois ou dans un an, sinon vous vous exposez à échouer, pensez plutôt : est-ce que ça tiendra dans dix ans ? Ayez patience et gardez une bonne équipe. Si vous pensez que quelqu’un est meilleur que vous suivez-le, si vous pensez que vous êtes meilleur, alors partagez vos idées, vos manières de penser ».
Des start-ups disséminées partout sur les stands des industriels, des organismes publics, des régions, des pays africains, venues « pitcher » devant près de 3.300 investisseurs et un millier de leaders industriels. Des grandes entreprises qui croient dans les start-ups et qui vont les chercher « pour aller plus vite plus fort » pour reprendre les propos du Président. Marché financier européen. Union des marchés de capitaux. Faire circuler l’épargne. Cela suppose une meilleure intégration européenne. « On a quelques leviers mais ça ne remplace pas la volonté, le courage et la détermination des entrepreneurs ».
Un évènement à portée politique tout autant que technologique surtout dans le contexte tendu de la guerre économique Etats-Unis-Chine dont le géant Huaweï a servi de détonateur et ferait les frais ? « Toutes les nouvelles transformations technologiques mènent à la guerre, à cause de l’augmentation des peurs » disait Jack Ma à Emmanuel Macron au Sommet Tech for Good à l’Elysée. Car, à la veille de l’ouverture de Viva Tech, le Président Macron recevait 60 leaders technologiques français et internationaux avec aussi des chefs d’état : Justin Trudeau, premier ministre du Canada, Macky Sall, président du Sénégal, et Paul Kagamé, président du Rwanda. Mark Zuckerberg, le patron de Facebook, aussi alors qu’il venait d’être auditionné par les députés européens suite à l’affaire Cambridge Analytica et que la RGPD est en place en Europe. De même que Ken Hu (PDG de Huaweï) ou encore Carlos Moedas et Pierre Moscovici, commissaires européens à la Recherche, à l’Innovation et à la Science pour le premier et aux Finances pour le second.
Des hommes politiques de diverses nationalités ont déambulé dans les allées bourdonnantes du salon : Japon, Taïwan, Maroc, Corée du Sud, etc… John Kerry, ancien Secrétaire d’Etat US du Président Obama, est intervenu le 22 mai, sa présence faisant contrepoids à celle de Steve Bannon.
Les ministres du gouvernement français s’y sont succédé. La Ministre de la Défense, Florence Parly, a fait le tour des stands, passant notamment dans le « parc des robots » sponsorisé par EDF pour admirer les évolutions d’Anymal, Antbot (CNRS) – et aussi les robots Twiice et Da Vinci. En compagnie de Cédric O, dont c’était en quelque sorte le « baptême du feu ». Arborant fièrement l’emblème (le coq rouge) de la French Tech, interviewé lui aussi par Maurice Levy le 23 mai, le tout nouveau secrétaire d’état au numérique reprend le flambeau. « La priorité est de définir une régulation spécifique des géants du numérique » a-t-il affirmé. « Que toutes les grosses levées de fonds se fassent avec des fonds américains, ce n’est pas mal en soi mais cela peut poser des problèmes. Le premier : si le marché se retourne, vont-ils retirer le tapis ? Ensuite des problèmes de souveraineté. Il faut pousser les fonds français à investir, il faut que plus d’argent français aille vers les entreprises françaises. Si on tient bon sur l’ISF, c’est plus pour une question de survie de l’écosystème. Si on touche à ça, on sort de l’histoire (…) La question de l’ambition et des levées de fonds va rester assez longtemps. Il y a une culture à changer, les français ont de l’appétence pour la pierre et les obligations d’Etat. Il faut faire en sorte que les gros investisseurs, comme les assureurs, aillent plus vers la tech, prennent un peu plus de risques. D’abord parce qu’il y a plus de retour et que c’est une question de survie de leur modèle ».
Géopolitique encore :« Pour ne pas se trouver avec un G2 US-Chine pour des dizaines d’années, il faut que l’Europe prenne la troisième place. L’Europe peut devenir le leader de la tech de demain. Avec un modèle démocratique soutenable. La Chine a un modèle de tech puissant mais stato-centré, il n’a pas notre référentiel en matière de libertés individuelles. Les Etats-Unis sont de formidables acteurs mais ils ont un modèle piloté par de grands acteurs privés, qui ne sont plus sous le contrôle démocratique en matière de respect de la vie privée ou du changement climatique. Nous avons du retard sur le plan du financement, mais nous avons de l’avance sur le plan de la conquête » a conclu le président Macron. Les élections européennes ont eu lieu le 26 mai et le parti du gouvernement LREM, bien que dépassé par le RN (23,31% des voix), a obtenu 22,41 % des suffrages et aura 24 députés (après Brexit) au Parlement européen pour faire adopter son programme au sein d’un groupe centriste.