Agro-environnement
Actualité
Le biocontrôle par la microbiologie de sols
Tribune libre de Christian Huyghe, directeur scientifique de l’INRA
Le sol est riche en matière organique et extrêmement riche en microbes ; ce « microbiote » est dépendant de l’histoire de la parcelle et il conditionne ses potentialités agronomiques : la capacité à faire pousser, c’est ça qui va déterminer la minéralisation de l’azote, la libération du phosphore etc…. L’histoire de la parcelle, les successions culturales et les modes de culture conditionnent largement la matière organique disponible dans le sol, grâce aux restitutions des cultures et la microflore du sol. Les prairies et les déjections animales contribuent à la restitution de grandes quantités de matière organique dans le sol. C’est aussi dans cet environnement là que sont présents des pathogènes qui vont attaquer la plante. L’hypothèse qu’on fait est que plus le sol sera riche en matière organique, microorganismes, plus il aura une microflore abondante et plus elle sera stable. Les milieux pauvres se déséquilibrent très vite, les milieux riches restent stables. C’est aussi le fonctionnement de cette biomasse microbienne qui va déterminer les émissions de gaz à effet de serre. Le dégazage de CO2 par le sol est lié à la matière organique et au fonctionnement de la microflore. C’est ce qu’il faut comprendre et qui offre potentiellement des leviers pour l’action. Et donc, on peut apporter des choses, par exemple, par les graines, soit les rhizobium qui vont permettre aux légumineuses de fixer l’azote, et potentiellement les mycorhizes : par exemple, quand on mycorhize des arbres pour faire des truffes, on apporte une modification importante dans cette flore microbienne.
La question qu’on se pose pour demain est la suivante : est-ce que cela pourra s’appliquer dans les démarches de biocontrôle? Les classes de biocontrôle sont les macroorganismes (les coccinelles par exemple), des phéromones et les kairomones *, des substances naturelles et des microorganismes. Avons-nous la capacité d’apporter via la graine des microorganismes qui vont permettre de lutter contre un pathogène du sol ? Si nous comprenons la flore microbienne, nous serons peut-être être en capacité de la manipuler. Ces avancées ont été rendues possibles par les gigantesques capacités de séquençage génomique du microbiote qui n’existaient pas il y a encore trois ans. Nous étions alors en capacité d’en séquencer quelques-uns mais pas dans les proportions actuelles. Nous avons des grandes capacités de traiter de l’information génomique avec l’URGI, le Génoscope. Toutes les plateformes de séquençage et de bioinformatique sont aujourd’hui inter-connectées. C’est un grand champ de connaissances et d’innovation qui s’ouvre.