Des chercheurs de l’Inra et leurs partenaires1 ont étudié chez l’animal les conséquences de la présence simultanée dans l’intestin d’un certain groupe de bactéries du microbiote et d’un contaminant alimentaire courant, le déoxynivalénol (DON). Ils montrent que la présence de cette mycotoxine renforce le caractère génotoxique des bactéries, c’est-à-dire augmente le nombre des cassures sur les brins d’ADN des cellules intestinales, phénomène pouvant conduire à l’apparition de cellules cancéreuses. Ces travaux posent en particulier la question de la synergie entre contaminants alimentaires et microbiote intestinal vis-à-vis du processus de cancérogenèse colorectale.
Le microbiote intestinal comporte chez l’Homme quelque 100?000 milliards de bactéries d’une très grande diversité. Escherichia coli, l’une d’entre elles, est très commune et comporte différents groupes. Les bactéries E. coli du groupe B2 produisent une substance génotoxique, c’est-à-dire qui produit des dommages sur l’ADN des cellules intestinales, appelée colibactine. On note aujourd’hui une augmentation des bactéries du groupe B2 dans le microbiote intestinal des populations des pays industrialisés.
Les mycotoxines sont les contaminants naturels les plus couramment présents dans l’alimentation humaine et animale. L’une d’elles, le déoxynivalénol ou DON, est produite par des moisissures de la famille des Fusarium se développant principalement chez les céréales. Les populations humaines y sont largement exposées en Europe et en Amérique du Nord par leur alimentation. En France et en Europe, l’exposition de certaines fractions de la population, en particulier les enfants, dépasse les valeurs toxicologiques de référence pour cette toxine.
Les chercheurs de l’Inra et leurs partenaires ont étudié in vitro et in vivo chez l’animal, les conséquences de la présence simultanée dans l’intestin de Escherichia coli produisant la colibactine et de DON.
Chez les animaux possédant les bactéries capables de produire la colibactine et ayant été exposés au DON par leur alimentation, les dommages sur l’ADN des cellules intestinales sont significativement plus nombreux, en comparaison avec des animaux ne produisant pas la colibactine. Ils montrent ainsi que la présence de la mycotoxine renforce le caractère génotoxique des E. coli du groupe B2.
Ces premiers résultats fournissent de nouvelles données interrogeant la synergie possible entre contaminants alimentaires et microbiote intestinal. Les chercheurs vont poursuivre leurs travaux pour comprendre le mécanisme en jeu dans le renforcement de cette génotoxicité en présence de DON, et des études sont envisagées pour compléter les observations jusqu’à un stade avancé de la cancérogenèse colorectale.
1Les partenaires de l’Inra pour ces travaux : Inserm, Université Toulouse III – Paul Sabatier, ENVT.