Agro-environnement

Édito

Préserver le capital biodiversité.

Partager sur facebook
Partager sur twitter
Partager sur linkedin
Partager sur google
Partager sur reddit
Partager sur tumblr
Partager sur pinterest

 

 

La loi sur la biodiversité  va repasser en deuxième lecture à l’assemblée Nationale au printemps. Les lobbies font plus que jamais pression sur les élus. La France est le premier consommateur de pesticides en Europe et le troisième au niveau mondial. Les sénateurs ont refusé le 22 janvier 2016 d’interdire l’usage des néonicotinoïdes, ces insecticides qui agissent sur les systèmes nerveux des abeilles. Ils ont repoussé plusieurs amendements qui visaient à interdire l’usage de cette famille de produits phytosanitaires. En effet, la Commission Européenne a approuvé cinq substances néonicotinoïdes et mis en place en 2013 des restrictions pour trois d’entre elles, les deux autres devant être réexaminées prochainement. Le Sénat s’en remet à un arrêté qui sera pris par le ministre de l’agriculture après le rapport de l’Anses .

Alors que les pesticides sont souvent invoqués comme une cause de la disparition des abeilles, Philippe Lecompte, apiculteur depuis 35 ans et président de RBA(Réseau Biodiversité pour les Abeilles) affirme que la production apicole dans sa région a été énorme en 2016, rattrapant les niveaux de production d’avant l’invasion de parasites des abeilles, le varroa, depuis les années 1970, et le Nosema ceranae, depuis 2005, qui perturbe les réactions endocriniennes de l’abeille. Les observations réalisées par RBA ont montré qu’une jachère apicole, une réserve de pollen et de nectar sur 0,5 % de la zone de butinage des abeilles, permet d’améliorer de 70 % le bol alimentaire au moment de la floraison. L’impact et la qualité de l’alimentation des abeilles, nécessaires à leur survie, sont liées à la biodiversité selon une étude de la NAS (Académie Américaine des Sciences).

La Plateforme intergouvernementale sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES en anglais), un organisme qui réunit 124 pays, créé en 2012 sous l’égide des Nations Unies a rendu son rapport le 26 février à Kuala Lumpur (Malaisie). Il en ressort que « plus des trois quarts des principales cultures mondiales destinées à l’alimentation dépendent d’une manière ou d’une autre de la pollinisation animale ». Et que la part de la production végétale attribuable à la pollinisation représente une valeur comprise entre 213 milliards et 524 milliards d’euros. Un capital biodiversité à préserver.

« Pesticides et biodiversité ne sont pas antinomiques » estime Bruno Chauvel, agronome de l’INRA, spécialisé sur les mauvaises herbes invasives signalant que les « les populations locales exigent un décret européen pour la stratégie de gestion d’une vingtaine d’espèces très envahissantes comme l’ambroisie à feuille d’armoise». Selon lui,  il faudrait rémunérer les agriculteurs pour l’entretien du patrimoine de la biodiversité et, il devrait y avoir un transfert des collectivités pour les services qu’ils rendent à la société. Les solutions ne peuvent pas être globales mais locales. Il faut générer de la biodiversité par le paysage et aider les agriculteurs à améliorer cette biodiversité. S’ils utilisent moins de désherbants dans leurs cultures en laissant pousser les mauvaises herbes, il faudrait leur accorder des compensations pour les pertes de rendements agricoles qui en découlent. Depuis quelques années, il y a une inflexion vers le verdissement de la PAC (Politique agricole commune) et la mise en œuvre d’un système de rotation des cultures : 30 % des jeunes agriculteurs font le choix d’une pluriactivité. Dans les Yvelines, à l’initiative de la sénatrice Sophie Primas, une étude menée par la SAFER (Société d’Aménagement Foncier et d’Etablissement Rural) avec le Museum d’Histoire Naturelle est en cours pour évaluer la perte de biodiversité, faire un repérage des compensations destinées à des opérateurs et créer des espaces dédiés à la biodiversité.

Thérèse Bouveret