Toulouse, le 9 juin 2023 – Le côlon aurait un effet anti-métastatique par le biais de ses propres lymphocytes T. C’est ce que démontrent des travaux menés à l’Oncopole de Toulouse et publiés aujourd’hui dans la revue Science Immunology.
Seulement un an après avoir remporté une dotation du Fonds Amgen pour poursuivre leurs recherches sur l’immunité des intestins, le Dr Christel Devaud et Virginie Feliu de l’équipe T2i du CRCT à l’Oncopole signent leur première publication dans la revue internationale Science Immunology. Leur découverte ? Une famille de lymphocytes T tueurs, les lymphocytes T CD8, qui dérivent spécifiquement du côlon et qui s’avèrent particulièrement efficaces contre les métastases. « Cette publication vient confirmer que nos travaux sont dans la bonne voie. Ils s’appuient pourtant sur une approche inédite dans ce domaine » confie le Dr Christel Devaud.
L’immunothérapie a, depuis une décennie maintenant, révolutionné la prise en charge des patients en oncologie. Les stratégies actuelles d’immunothérapie sont basées sur des anticorps monoclonaux qui lèvent les freins des lymphocytes T antitumoraux préexistants chez les patients. Malgré le caractère immunogène du cancer colorectal (CRC), les immunothérapies, éprouvées dans la majorité des essais cliniques chez les patients atteints de cancer colorectal métastatique (mCRC), s’avèrent malheureusement peu efficaces. Les métastases hépatiques, les plus fréquentes dans le CRC, sont particulièrement difficile à traiter.
Les lymphocytes T CD8+ font régresser les métastases
En utilisant un modèle original de mCRC chez la souris, consistant à implanter des tumeurs, en orthotopique, c’est-à-dire dans le colon et dans les sites métastatiques, le Dr Christel Devaud et Virginie Feliu ont découvert que les tumeurs de colon pouvaient stimuler des lymphocytes T CD8+ antitumoraux, capables spontanément de contrôler la croissance de la tumeur primaire mais aussi de métastases à distance, en particulier hépatiques. Ces lymphocytes T CD8+ effecteurs, jouant un rôle déterminant dans le contrôle des métastases, ont une origine intestinale, confirmée par l’expression à leur surface de l’intégrine a4b7, responsable de la localisation et de la rétention intestinale des cellules de l’immunité. Les résultats, obtenus chez la souris, ont été validés par une analyse des lymphocytes T CD8 a4b7 dans les métastases et le sang de patients souffrant de mCRC et traités par immunothérapie. Ces travaux démontrent que les lymphocytes T CD8 intestinaux a4b7, activés localement dans les tumeurs de colon, sont des effecteurs clés de l’immunité antitumorale et peuvent exercer des fonctions effectrices systémiques aboutissant au contrôle de la maladie métastatique.
Une nouvelle voie pour traiter les métastases
Les perspectives de ces résultats sont doubles. D’un point de vue de recherche fondamentale, ce travail démontre un rôle de l’immunité intestinale dans l’immunosurveillance systémique du cancer et ouvre la voie à l’exploration de ses mécanismes sous-jacents et de son rôle physiopathologique. Des perspectives cliniques, celles-ci à plus long terme, pourraient en découler, notamment le développement de stratégies nouvelles d’immunothérapie pouvant contrôler la maladie métastatique dans le CRC.
Lien vers la publication : https://www.science.org/doi/10.1126/sciimmunol.adg8841
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