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Communiqué de presse

Mémoire & Dépression Comment la dépression influe-t-elle sur notre mémoire

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Paris, 11 janvier 2024 – À l’approche du Blue Monday le 15 janvier, réputé comme étant la journée la plus déprimante de l’année, l’Observatoire B2V des Mémoires se penche sur les liens entre la mémoire et la dépression. Est-ce que la mémoire peut être « réparée » une fois l’épisode dépression terminé ? A-t-on déjà assez de recul pour connaître l’impact de la pandémie sur notre cerveau ? Francis Eustache, Neuropsychologue et Président du Conseil Scientifique de l’Observatoire B2V des Mémoires, ainsi que Catherine Thomas-Antérion, Neurologue, Docteure en neuropsychologie et membre du Conseil Scientifique de l’Observatoire B2V des Mémoires, ont entrepris de clarifier ces interrogations.

1 – La dépression peut-elle entraîner une perte de la mémoire ?

La dépression est un terme générique qui regroupe des situations très différentes. Elle concerne une personne jeune ou âgée, est faite d’un épisode unique ou récurrent, est simple ou accompagnée d’autres troubles psychiques dont le plus fréquent l’anxiété (il s’agit des comorbidités). Le sujet dépressif présente une humeur triste, une perte des intérêts, une diminution de l’élan vital et de l’activité ; cette baisse de régime est ressentie comme source de fatigue et le déprimé a du mal à se lever le matin. La personne souffre d’un manque de confiance et d’estime de soi, de culpabilité ou de dévalorisation. Les idées suicidaires sont un symptôme inquiétant, avec un risque suicidaire proportionnel à la gravité de la dépression. La dépression modifie le sommeil, la libido, l’alimentation : le poids est un bon élément de suivi.

La dépression n’est pas en tant que telle une maladie de la mémoire. Toutefois, la modification du moral peut modifier le fonctionnement de la mémoire (saisie et récupération des souvenirs), gêner la concentration et entraîne un ralentissement idéomoteur. De plus, les insomnies modifient la qualité de la consolidation des souvenirs qui n’est plus renforcée pendant le sommeil. Ce dysfonctionnement est très différent de la maladie d’Alzheimer qui en altérant des éléments anatomiques du circuit de la mémoire conduit le malade à oublier des pans entiers de sa vie (souvenirs anciens), à être dans l’incapacité d’enregistrer de nouvelles informations et enfin à ne plus se projeter dans le futur (se rappeler par exemple ce qu’il doit faire le lendemain). Le dépressif a des difficultés à se rappeler spontanément les informations. Dans les tests de mémoire, cela correspond aux conditions de rappel libre ou d’évocation spontanée. C’est un problème  fonctionnel d’accès qui peut être amélioré avec des indices (le mot recherché est celui d’un animal) et dans la vie par le contexte ou un peu d’aide (retrouver le papier sur lequel on a marqué l’heure du RV).  Au contraire, les indices aident peu ou pas le malade souffrant de maladie d’Alzheimer. De plus, le contenu des souvenirs peut être modifié par les idées noires et ceux-ci, à leur tour, envahissent les pensées du dépressif entraînant un cercle vicieux et aggravant le moral. La distorsion de la perception du temps et notamment la projection dans le futur avec l’impression d’un temps qui s’accélère est aussi souvent rapportée. Les souvenirs épisodiques biographiques sont rares, émoussés et « sur-généralisés », le dépressif replié sur lui-même est envahi par des émotions négatives où prédomine la tristesse.

 

2 – Comment la dépression modifie-t-elle notre cerveau ? Une fois l’épisode dépressif résolu, la mémoire est-elle de nouveau efficace ?

Les recherches en neurosciences, en utilisant des méthodes d’imagerie cérébrale fonctionnelle, mesurent dans certaines conditions des variations de métabolisme correspondant aux descriptions cliniques et un dysfonctionnement des circuits qui relient les régions préfrontales (en avant du cerveau) et les hippocampes, impliquées dans la mémoire déclarative, l’attention, la concentration, la mémoire de travail et la vitesse de traitement. Ces modifications concernent les régions sous-tendant les fonctions de contrôle : encodage et récupération, ce qui se traduit dans les tests de mémoire par une évocation libre insuffisante.  Ces observations sont faites dans le cadre de la recherche sur des groupes de patients. Les examens d’imagerie n’ont pas d’intérêt dans le suivi d’un dépressif : l’IRM est normale (pas de lésion de structure) et au niveau individuel, les variations de métabolisme sont peu significatives, contrairement à la maladie d’Alzheimer, où les examens d’imagerie cérébrale structurale (recherche d’une atrophie) et fonctionnelle (hypométabolisme) contribuent au diagnostic. La dépression guérit, le fonctionnement de la mémoire est rétabli (comme le sommeil, l’appétit etc.) mais il peut demeurer une pauvreté des souvenirs biographiques collectés pendant cette période avec un excès de souvenirs tristes.

 

À propos de l’Observatoire B2V des Mémoires

Créé en avril 2013 par le Groupe de protection sociale B2V, l’Observatoire B2V des Mémoires étudie la mémoire sous toutes ses formes : individuelle, collective, numérique… Son Conseil scientifique réunit d’éminents chercheurs en neurosciences et sciences humaines. Les actions menées au sein de ce « laboratoire sociétal » visent à favoriser la prévention à travers deux grands axes : soutenir la recherche et diffuser au plus grand nombre les avancées de la science en vulgarisant l’information scientifique pour faciliter sa compréhension.

Pour ne citer que quelques actions menées par le fonds de dotation Observatoire B2V des Mémoires : la bourse doctorale ; la publication de livres sur le thème de la mémoire ; l’événement grand public La Semaine de la Mémoire ; le podcast Mémoire, dis-moi qui suis-je ?

www.observatoireb2vdesmemoires.fr